JOURNEE D'ETUDES AU CEDRE 14 JUIN 2001

 

Le BRUIT des AVIONS - Aspects juridiques

Colloque organisé le 14 juin 2001 à Bruxelles, rue du Lombard 69 (Parlement bruxellois) par
LE CENTRE D'ETUDE DU DROIT DE L'ENVIRONNEMENT (CEDRE)
Facultés Universitaires Saint-Louis.

(Les textes des exposés n'étant pas encore disponibles, voici un premier résumé très succint)

1.Etat de la réglementation internationale et communautaire en matière de bruit des avions.
Geert van Calster - chercheur à la Kul Leuven et avocat au barreau de Bruxelles -

Le conférencier expose les différents articles de la Convention de Chicago du 7 décembre 1944 qui régissent la navigation aérienne internationale. Il cite surtout les art. 6 et 9 se rapportant au respect des zones interdites, aux taxes liées aux charges de bruit, aux certificats de navigabilité, aux manuels de guide des aéroports, etc... Cette convention vise surtout à la standardisation et à l'harmonisation des règles internationales. Les normes édictées sont plus ou moins strictes et tendent à établir un équilibre entre réglementation et souveraineté des Etats. Les dérogations sont uniquement à signaler.
Très important, l'adoption en 1962 de l'Annexe 16 à la convention précitée, qui vise à la réduction du bruit des avions à la source, et classe les avions en chapitres 2,3,4... selon leur ancienneté et leurs caractéristiques acoustiques. Ex : chapitre 2, avions d'avant '77 comme le Boeing 727 ; chapitre 3, Boeing 767 ; chapitre 4, avions plus récents... Le programme appelé phasing-out vise a interdire de vol les avions de Chapitre 2, mais pas avant 2002.

La réglementation en Communauté européenne vise surtout à la facilitation du libre-échange. Une directive européenne de mars 1992 interdit déjà les avions les plus bruyants sur les aéroports européens à partir d'avril 2002. Mais les avions dits 'hushkittés' sont recertifiés et passent dans une catégorie supérieure (chap. 3), ils ne sont donc pas visés par cette directive. En 1999, l'Europe a voulu interdire les avions 'hushkittés' aussi, mais s'est trouvée en désaccord avec les Etats-Unis. Il n'y a pas de consensus au sujet des avions de chapitre 3 en Communauté européenne. Il reste donc beaucoup de pain sur la planche pour le sommet de Leuven et Louvain-la-Neuve au mois de septembre prochain !

2. La réglementation fédérale et régionale en matière de bruit des avions.
Delphine MISONNE - chercheur au CEDRE, Facultés Universitaires Saint-Louis -

Malgré la complexité de la matière, madame Misonne a su donner un aperçu assez clair de la situation tant pour l'aéroport de Bruxelles-National que pour les aéroports wallons.

La loi qui régit la navigation aérienne date de 1937. Celle-ci est toujours en vigueur. C'est à partir de l'action des riverains que la réglementation a commencé à évoluer. En 1980 a été introduit le certificat de navigabilité. Un A.R. du 20 mai 1997 interdit les avions chapitre 2 la nuit (on sait ce qu'il en est pour les avions recertifiés) et en septembre 2000 un autre A.R. stipule que tous les avions admis sur nos aéroports doivent être au moins chapitre 3, sauf dérogation. Des normes d'immission (bruit d'environnement) ont été établies en 1999. On connait par ailleurs l'accord du 11 février 2000 dont les effets sont échelonnés sur trois années. Cet accord prévoit en outre la réforme du Code de l'Air de 1937.
L'aéroport de Bruxelles-National dépend du Fédéral, sauf pour les questions d'environnement qui sont de la compétence de la Région flamande.
Belgocontrol est une entreprise publique qui contrôle la navigation aérienne et assure la sécurité pour tous les aéroports du pays.
Biac est la société autonome de droit public qui exploite l'aéroport de Bruxelles-National.
C'est Biac qui est tenu pour responsable des nuisances. Un permis d'environnement 'Vlarem' est délivré sous l'autorité de la Ministre flamande de l'environnement, Madame Vera DUA. Celle-ci a décidé de limiter le nombre de vols nocturnes à 25.000 par an et le bruit maximum par avion la nuit à 80 DB(A), à partir de janvier 2002. (DHL a introduit un recours contre cette décision). Depuis son ordonnance de février 2000, la Région de Bruxelles-Capitale dresse PV pour les dépassements des normes de bruit par les avions survolant son territoire. L'I.B.G.E (Institut Bruxellois de Gestion de l'Environnement) a accès aux informations de Biac et de Belgocontrol afin d'identifier les contrevenants. Par ailleurs, les redevances aéroportuaires ont d'ores et déjà été revues. La question des pistes et des routes n'a pas été abordée par la conférencière.

Les aéroports wallons tels que Liège-Bierset et Charleroi-Gosselies sont entièrement soumis à l'autorité régionale. La SAB et la BSCA n'ont pas le même statut que BIAC. Les heures d'ouverture ont été fixées par décret : jour et nuit pour Liège-Bierset, 6.00 à 23.00 pour Charleroi-Gosselies. Un projet de permis d'environnement est à l'étude. Les redevances sont forfaitaires. Un plan d'exposition au bruit a été élaboré en zones (1973). Selon les zones on procèdera soit à l'isolation des immeubles, soit au rachat.
Conclusion : Les régimes des aéroports de Bruxelles-National et de Wallonie sont très
différents. Visualisation d'un tableau comparatif.

3. Quelle marge de manoeuvre pour les Etats membres au regard du droit des transports aériens ? Werner EYSKENS - avocat au barreau de Bruxelles - Gauthier VAN THUYNE - avocat et assistant au Seminarie voor Milieurecht, Rijksuniversiteit Gent -

Pour l'Union européenne, la base juridique est le Traité de Rome, art. 95 et 175. Si la matière est entièrement réglée, il n'y a pas de marge, ex. les déchêts. En cas d'harmonisation minimale, des dérogations plus strictes sont possibles. ( l'Italie a interdit tous les vols nuit !)
Sur le plan juridique, les défendeurs sont : l'aéroport - la compagnie - le constructeur - les autorités publiques - le coordinateur. Les demandeurs : un particulier - un groupe de riverains - une entreprise - une association de défense de l'environnement...
Jurisprudence internationale, ou pourquoi des plaintes ont été rejetées dans le passé : Schiphol-Amsterdam, pour compétence exclusive de l'Etat ; Sandiego, rejet par la cour de Californie au nom de l'intérêt général ; Hollywood, vols de nuit, rejet par la cour suprême des Etats-Unis, motif : exclure le bruit = exclure l'avion, etc...
En 1975 l'exploitation du Concorde avait fait l'objet d'une interdiction aux Etats-Unis, mais ce rejet a été réformé par la suite. Les aéroports ont été reconnus compétents pour accueillir l'avion supersonique.
Pourtant en 1914 déjà des 'troubles de voisinage' ont été reconnus en France. Plus récemment, pour un immeuble à Nice, au nom du droit de propriété et pour cause de dévaluation du bien, le constructeur, ainsi que Air France ont été jugés responsables.
Pour le dommage au sol, la convention de 1952 (Rome) stipule cependant que le dommage doit être subit et imprévisible ! Une nuisance continue, si perturbante soit-elle, n'entre donc pas en ligne de compte. Il y a en outre une distinction entre dommage matériel et immatériel : le dommage doit être chiffrable. Pour l'attribution des 'slots', la loi n'admet pas la prise en considération de la catégorie (chapitre) des avions. Pas de priorité accordée aux avions les moins bruyants !

4. Questions relatives au cadre institutionnel et légal qu'offre le droit public belge en matière de bruit des avions. Benoît JADOT - Chargé d'enseignement aux Facultés universitaires Saint-Louis, CEDRE -

La lutte contre le bruit se fonde sur la loi de 1973. Mais il n'est pas possible de régler le problème du bruit des avions au fond. Les art. 1 et 2 visent à combattre les causes du bruit, la source. Le cadre légal prévoit la compétence des Ministres de la Santé et de l'Environnement et non du Ministre des Transports seul, afin d'éviter les résistances ! l'A.R. de 1980 donne la compétence aux Régions dans la lutte contre le bruit. D'où nombreuses divergences entre Régional et Fédéral, mais aussi entre Régions contiguës. Dans les missions de BIAC est inclus la gestion du bruit. BIAC est donc tenu d'imposer des règles minimisant le bruit. Ces règles donnent tout au plus lieu à des amendes administratives, leur effet est donc limité.
Compétences respectives des autorités Fédérales et Régionales :
· Réglementation de la navigation et de la sécurité aérienne = compétence Fédérale.
· Combattre le bruit et la pollution = compétence Régionale.
Le Fédéral est responsable des normes, pas de l'utilisation. Le principe de proportionnalité doit toujours être respecté (ne pas rendre l'exploitation impossible), et ce dans les deux sens. Le territoire, le sol, est du ressort des Régions, mais la compétence territoriale de l'espace aérien ne l'est pas ! Le Fédéral est donc compétent pour organiser l'espace aérien. D'où nécessité de coopération entre le Fédéral et les Régions. Un vrai casse-tête pour l'aéroport de Bruxelles-National !

5. Les droits des riverains pour la défense de la qualité de leur environnement sonore.
François TULKENS - Chargé d'enseignement aux Facultés universitaires Saint Louis,
avocat au barreau de Bruxelles -

Heathrow-Londres 21 février '90 , jugement positif, établit un juste équilibre entre les parties en se basant sur l'art. 8 des Droits de l'homme. Bruxelles-National 11 juin '96, vols de nuit sur 3 communes de Bruxelles, le juge interdit les vols. Le jugement est réformé en appel le 24 janvier '97 et impose une répartition des nuisances tout autour de l'aéroport. Il est à remarquer que l'on condamne généralement en 1e instance, rarement en appel.
L'art. 23 de la Constitution donne droit à un environnement sain, l'art. 8 des Droits de l'homme au respect de la vie privée et familiale. Les nuisances environnementales portent donc atteinte à l'un et à l'autre, d'où obligation d'agir pour les autorités.
Néanmoins, à quelques années de distance, les tribunaux de Bruxelles et de Liège ont rendu des jugements tout à fait contradictoires, l'un pour Zaventem, l'autre pour Bierset. Selon la Présidente du Tribunal de Liège, la Région wallonne et la S.A.B. ont commis une faute en violant l'article 8 de la Convention européenne des Droits de l'homme. Il en résulte une insécurité juridique et pour l'exploitant et pour le riverain. Avec l'accord de février 2000 on constate un retour au normatif. Des commissions de concertation sont créées. A Bruxelles-National c'est l'éparpillement entre Overlegcommissie, Forum Biac et Service Médiation...
Une évolution dans les indemnisations due aux arrêtés judiciaires est en cours à Bierset.
Est condamnable tout ce qui est excessif ou anormal !

Différences entre les politiques des Régions : - Wallonie plus consensuel
- Flandre plus environnemental (Vlarem)
- Bruxelles plus coercitif.

Table ronde

Etaient présents face au public :
Didier Gosuin, Ministre de l'environnement de la Région de Bruxelles-Capitale.
Eric Monami, conseiller de la Ministre de la Mobilité et des Transports Isabelle DURANT. Stéphanie Scailquin, Inter-Environnement Wallonie.
Yvan Vandenbergh, Inter-Environnement Bruxelles.

- Eric Monami, conseil de Madame Durant, énumère les points déjà acquis. Les quotas
acoustiques ont été arrêtés pour Bruxelles-National. Il y aura un maximum de contraintes
pour les vols de nuit : composition de la flotte, procédures, isolation des habitations...
En premier lieu les mesures préventives, ensuite les mesures curatives. Un avion bruyant
la nuit payera 4 fois plus de redevances qu'un avion silencieux le jour...

- Stéphanie Scalquin explique la situation des riverains de Bierset face au système de rachat et d'isolation d'immeubles suivant des zones qui sont de plus en plus contestées...

- Yvan Vandenbergh, Interenvironnement Bruxelles et " Air Libre ", dit que son groupe n'est pas invité aux réunions. Il déplore qu'on ne mette aucune limite au développement de l'aéroport : " lorsque Mr. Klees parle de doubler le trafic, aucun ministre ne le contredit ". Il met en cause la privatisation programmée de Biac, la grave pollution de l'air, la non-taxation du kérosène, le risque d'accident (Bruxelles survolé par 500 avions tous les jours). Il se demande qui serait responsable si un avion tombait sur Bruxelles. Développer le trafic aérien est-ce un but en soi ? Il faudrait diminuer les vols à 200.000 par an plutôt que de les doubler à 700.000. Pourquoi pas de second aéroport national ? Il pense que c'est un problème communautaire, donc tabou. Alors que Grimbergen s'est débarrassé d'un petit aéroport de plaisance, Biac s'empare de cette route pour y envoyer des gros porteurs...

- Le Ministre Gosuin demande que le Fédéral prenne ses responsabilités afin de remplacer
l'arrêté bruxellois par une mesure interrégionale. Il met aussi en avant les points suivants :
· Pour les procédures de vol il faut tenir compte de la densité de l'habitat.
· Sonomètres : la Région bruxelloise a dû ajouter des points de contrôle à l'Est de Bruxelles pour obtenir les mesures néssaires à l'exécution de l'ordonnance anti-bruit.
· Pour le fonds d'isolation il faut consentir les investissements nécessaires. La gestion de ce fonds par Biac est qualifiée d'absurdité.
· Une entente entre les Régions est nécessaire pour déterminer les couloirs de vol.
· Il faut donner à Biac les pouvoirs qui lui reviennent et pas plus, l'exploitant ne peut
pas être juge et partie.

- Réponse de Eric Monami qui déplore aussi l'augmentation du trafic et la pollution atmosphérique (à relativiser pour la capitale, les vents soufflant dans le sens contraire). Il y aurait un risque d'immobilisation si on devait associer les riverains et les Régions aux travaux de 'Probru'. Il est possible de concentrer les avions sur une trajectoire à condition d'isoler les habitations. Le non-survol d'un rayon de 5 km à partir du centre de Bruxelles serait impossible à la tangente car trop dangereux. Déjà la route Chabert a été supprimée. Le service de médiation renseignera les opérateurs et les riverains sur les trajectoires. La décision concernant les couloirs de vol tombera dans les toutes prochaines semaines.

Compte rendu par Josée RITS

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